Créer une entreprise en Turquie: Guide Pratique 2025-2026

La Turquie n’est plus seulement une tête de pont entre l’Europe et l’Asie; c’est un marché en pleine expansion avec ses propres codes et exigences. Si les investisseurs s’y bousculent, c’est pour sa logistique stratégique et sa démographie dynamique. Cependant, soyons réalistes: la bureaucratie turque peut s’apparenter à un labyrinthe, et les informations obsolètes coûtent cher. Ce qui était vrai il y a deux ans est souvent caduc aujourd’hui.

Cet article n’est pas un exposé théorique. Nous analysons le processus à travers le regard du praticien: où se situent les véritables obstacles? Quelles sont les nouvelles lois en vigueur pour 2025 et 2026? Et surtout, comment éviter les erreurs qui ont coûté des milliers de livres turques à d’autres entrepreneurs.

Pourquoi la Turquie? (Au-delà du discours marketing)

Oubliez un instant les arguments classiques sur le soleil et l’hospitalité. Sur le plan économique, nous parlons d’un pays doté de 416 zones industrielles organisées (OSB) et d’une base de production massive. Pour comprendre le potentiel, observez les secteurs porteurs comme celui des meubles turcs, qui illustre parfaitement la puissance exportatrice du pays. Ces entreprises utilisent la Turquie comme un hub logistique majeur.

L’analyse des indices du commerce extérieur montre que, malgré les fluctuations mondiales, le volume des exportations reste le véritable moteur de l’économie. Mais pour en profiter, vous devez maîtriser les aspects réglementaires.

Création d'une entreprise en Turquie

Incitations étatiques: lire entre les lignes

La Turquie attire agressivement les investisseurs, mais les conditions se sont durcies. Il faut distinguer les promesses sur papier de la réalité opérationnelle de 2025/2026.

  • Zones franches (Serbest Bölgeler): Il existe 19 zones actives. L’avantage classique: 100 % d’exonération des droits de douane et de la TVA. Attention: depuis le 1er janvier 2025, l’exonération de l’impôt sur les sociétés pour les ventes des zones franches vers le marché intérieur turc a été supprimée. Elle ne s’applique désormais qu’aux véritables exportateurs (taux d’exportation de 85 %).
  • Zones de développement technologique (Technoparcs): Idéal pour le logiciel et la R&D. Le soutien au télétravail a été prolongé jusqu’à fin 2025 (100 % pour les informaticiens). Toutefois, un nouveau plafond sur l’exonération de l’impôt sur le revenu des salariés a été instauré, désormais lié à 40 fois le salaire minimum.

Formes juridiques et nouvelles exigences de capital (Mise à jour 2025)

C’est le point crucial: l’inflation a poussé le gouvernement à relever les seuils de capital minimum. Si vous calculez avec les anciens chiffres, votre dossier sera rejeté par le registre du commerce.

  • Limited Şirket (Ltd. Şti. – l’équivalent de la SARL): C’est le choix de 90 % des PME. Le capital social minimum est désormais de 50 000 TL (contre 10 000 TL auparavant).
  • Anonim Şirket (A. Ş. – Société Anonyme): Pour les opérations de plus grande envergure ou l’entrée d’investisseurs. Le capital minimum est passé à 250 000 TL (et même 500 000 TL pour les A. Ş. non cotées avec système de capital enregistré).

Conseil d’expert: Ne versez pas seulement le minimum. Les banques et fournisseurs voient un capital plus élevé comme un gage de sérieux. De plus, les entreprises existantes ont jusqu’à fin 2026 pour ajuster leur base de capital.

Le processus de création: numérique, mais complexe

Le processus centralisé passe par le système MERSIS. En 2025, un changement majeur est intervenu: l’utilisation d’une signature électronique qualifiée (E-Imza) ou mobile est désormais obligatoire pour presque toutes les étapes. L’époque des simples signatures manuscrites est révolue.

Les étapes indispensables

  1. Enregistrement MERSIS et statuts: Tout commence en ligne. Vous aurez besoin d’un numéro fiscal turc pour étranger (Potansiyel Vergi Numarası). Pour faciliter vos démarches administratives, assurez-vous de bien comprendre le format d’une adresse en Turquie pour votre siège social.
  2. Notarisation: Même à l’ère numérique, la Turquie reste attachée au notaire. Les passeports doivent être traduits et certifiés.
  3. Autorité de la concurrence (Rekabet Kurumu): 0,04 % du capital doit être versé. Cela se fait aujourd’hui de manière intégrée via le système de suivi des frais de MERSIS.
  4. Compte bancaire et dépôt du capital: Pour une A. Ş., 25 % du capital doit être bloqué avant la création. Pour une Ltd., le capital peut souvent être versé après l’immatriculation, dans un délai de 24 mois.
  5. Registre du commerce: L’immatriculation finale prend généralement 1 à 3 jours si le dossier est complet.

Fiscalité et comptabilité: les chiffres 2025/2026

En Turquie, un bon comptable (Mali Müşavir) n’est pas une option, c’est une obligation légale. Le paysage fiscal s’est durci:

  • Impôt sur les sociétés (Kurumlar Vergisi): Le taux général en 2025 est de 25 %. Il s’élève à 30 % pour les institutions financières. Grande nouveauté: l’introduction d’un « impôt minimum national sur les sociétés » de 10 % pour limiter l’évasion fiscale.
  • Impôt sur le revenu: Les tranches sont progressives. En 2025, le taux est de 15 % jusqu’à 158 000 TL, tandis que le taux marginal de 40 % s’applique au-delà de 4,3 millions TL.

Recrutement: embaucher des étrangers

De nombreux fondateurs souhaitent recruter des expatriés. C’est possible, mais coûteux et très encadré.

Le ministère du Travail applique strictement la règle du 5:1: pour chaque étranger embauché, vous devez employer cinq citoyens turcs. De plus, pour obtenir l’autorisation d’embaucher un étranger, le capital versé de votre entreprise doit désormais être d’au moins 500 000 TL (ou un chiffre d’affaires brut de 8 millions TL).

Les coûts en 2025: Prévoyez environ 10 571 TL pour les frais de permis de travail d’un an, hors frais de carte de séjour.

Établir une société en Turquie

Aperçu des coûts: quel budget réel pour démarrer?

En dehors du capital social, prévoyez les frais administratifs suivants:

  • Chambre de commerce (ex: ITO à Istanbul): Frais d’immatriculation d’environ 2 610 TL et cotisation annuelle entre 2 650 et 3 800 TL.
  • Frais de notaire: Pour les statuts, la circulaire de signature et les traductions, comptez entre 5 000 et 10 000 TL minimum.
  • Expert-comptable: Les honoraires mensuels pour une petite structure démarrent rarement en dessous de 3 000 – 5 000 TL.

Conclusion

Créer une entreprise en Turquie en 2025 est devenu plus onéreux et plus numérique qu’auparavant. Le relèvement du capital minimum à 50 000 TL (Ltd.) et 250 000 TL (A. Ş.) permet d’assainir le marché. Pour ceux qui considèrent la Turquie non pas comme un simple atelier à bas coût, mais comme un site stratégique, les opportunités restent immenses. La clé du succès ne réside pas seulement dans votre idée de business, mais dans le choix d’un Mali Müşavir compétent pour naviguer dans la nouvelle jungle fiscale.

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